mercredi 31 août 2011

Face cachée - Sylvain Runberg et Olivier Martin - Ma BD du mercredi

Cet album a reçu à Tokyo  le deuxième prix 2011du concours international du manga ; le premier prix allant à l’auteur chinois Xiao Bai pour Si loin si proche.
Tôt le matin dans le métro de Tokyo, un homme élégant  et dynamique se rend à son bureau dans une grande entreprise au centre de la ville. C’est Satoshi Okada, un brillant analyste financier,  sorti premier de sa promo,  qui semble très estimé par son patron, courtisé par sa jeune secrétaire Mayumi et jalousé par son collègue Junichi. Tous les soirs avant d’aller dormir dans sa cellule hôtel, il téléphone à la mère de sa petite fille qu’il rentre voir chaque fin de semaine en banlieue. C’est l’image même de l’homme parfait. 
Cependant, tout dans sa vie n’est pas si lisse qu’il y paraît et peu à peu on découvre les aspects cachés de sa vie si bien rangée. Les surprises vont en s’accélérant et je n’ai qu’une idée en tête maintenant c’est de lire la suite et la fin de l’histoire dans le second et dernier album sorti en juin dernier et qui est très surprenant paraît-il. Le suspense reste entier. 
J’aime beaucoup le graphisme et les planches silencieuses.  Pas un mot de trop, juste l’essentiel. On prend son temps pour dérouler les situations et les habitudes des patrons et des cadres japonais. On déambule dans la ville et on s’y croit. Reste maintenant à voir vraiment le revers de la médaille, cette face cachée promise aux lecteurs. Vivement la lecture du tome 2! 
Face cachée - Sylvain Runberg et Olivier Martin.  Première partie (Futuropolis, juin 2010, 152 pages) Ma BD du mercredi.




Participent aux BD du mercredi: 
Arsenul Benjamin, Choco, Chrys, Delphine,  Didi, Dolly,  Emmyne, Estellecalim, Hilde, Hérisson08, IrrégulièreJérôme,     Kikine, La Ronde-des-pos-it
, Lire pour le plaisir, Lou,  Lounima, Lystig Mango, Manu,  Margotte, Marguerite,  Mathilde,Moka,  Mo', Noukette, Pascale,   Sandrounette, Sara Soukee, Theoma, Valérie,  Vero,Wens, Yaneck, Yoshi73  Yvan, Mr Zombi
Je participe aussi au challenge BD Pal sèches  de Mo', au Top BD de Yaneck. (Note: 17 /20)

mardi 30 août 2011

Pig Island de Mo Hayder

Jusqu’où me conduit l’aventure des lectures communes?  A lire deux fois plus tout simplement. Ne trouvant pas au bon moment le livre de Mo Hayder: «Tokyo», je me suis contentée du seul titre trouvé à la bibliothèque: "Pig Island" sorti juste après le succès de «Tokyo» que je m’apprête à dévorer maintenant.
Je n’ai pas été déçue par celui-ci, même si ce n’est pas non plus un des meilleurs thrillers que j’ai pu lire.
Pig Island, où se déroule l’histoire, est une île écossaise, grand centre d’élevages de porcs devenu lieu d’élection d’une secte menée par un gourou, Malachi Dove, ancien guérisseur dénoncé par le héros, Joe Oakes, journaliste spécialiste dans la chasse aux phénomènes paranormaux. 
Justement des rumeurs courent concernant l’existence d’une créature diabolique vue sur une photographie prise sur l'île par un touriste. Il s’agit d’une silhouette humaine avec une excroissance codale.
L’atmosphère sur cette île est infecte: odeurs pestilentielles de chairs mortes, cadavres de porcs en décomposition, disséminés partout.
Le journaliste enquête et raconte ses faits et gestes dans une première partie. Des événements plus horribles les uns que les autres se produisent dans la recherche de son pire ennemi, ce Malachi qui le menace.
Le pire cependant survient dans la seconde partie où sa femme devient la narratrice. Ils doivent se cacher à Londres après l’explosion de la secte. Angeline, la fille de leur ennemi les accompagne. C’est elle le monstre pris en photo. Elle porte une troisième jambe, reste d’une créature siamoise non aboutie. 
Nous sommes encore loin du pire lorsque Joe Oakes s’attache à elle et que sa femme meurt dans des conditions atroces.
La troisième partie, trop courte à mon goût, ne sert qu’à donner les explications de toutes ces folies meurtrières. Naturellement, c’est un choc et les monstres ne sont pas forcément ceux auxquels on s’attendait. 
Mo Hayder a l’art de surprendre et d’obliger son lecteur à lire jusqu’au bout malgré certaines lenteurs parfois et surtout en passant par-dessus bien des incohérences mais il ne faut pas s’y attarder et suivre le mouvement endiablé de la narration. Pas mal! 
Pig Island de Mo Hayder (Presses de la cité, 2006, 390 pages) Traduit de l'anglais par Hubert Tézenas
Nouvelle participation au challenge de Kathel et à celui de Cynthia

lundi 29 août 2011

TF, hier soir à "Sept à Huit", entretien Thierry Demaizière et Cécile Huguenin, l'auteur de "Alzheimer mon amour".

Entretien très réussi, hier soir sur TF1 dans l'émission "Sept à Huit" de  Harry Roselmack, entre Thierry Demaizière et Cécile Huguenin, l'auteur du livre sur son mari,  "Alzheimer mon amour".   Brize, Clara, Kathel, Aifelle, Cathulu, Keisha, Chiffonnette, L’encreuse et Sandrine ont toutes aimé et commenté ce livre témoignage que j'espère lire bientôt aussi.

Une  vidéo de cette interview  peut se voir en ce moment .

L'homme-sœur de Patrick Lapeyre


Prix Inter 2004, ce livre a été jugé «cruellement drôle», étonnant et subtil, mais
de quoi s’agit-il ? De rien de moins et de rien de plus que ce que suggère le titre: un homme attend sa sœur durant toute sa vie. Il en est amoureux et les autres femmes  qui gravitent autour de lui ne réussissent pas à l’intéresser.

Tout est dit dès les premières lignes sauf qu’on ne le sait pas encore.
«Depuis des années Cooper est prisonnier d’un après-midi. Il ne peut rien y faire. Où qu’il aille, où qu’il s’arrête, il a son après-midi avec lui. Qu’il soit à table avec des amis, ou à la banque, pendant une réunion de travail, il arrive toujours un moment où, sans doute à cause d’un procédé de fixation qui lui échappe, il retourne à son après-midi.» 
A six heures du soir, ce jour-là, sa sœur et lui,  seuls dans une voiture arrêtée au bord d’une route, attendent le retour du conducteur. «Louise s’était finalement assoupie contre lui, si nue dans sa petite robe de coton blanc que Cooper n’avait pas osé bouger. Aujourd’hui, quand il retourne dans son après-midi, il sent encore sur ses bras  le poids de son corps endormi.«Son obsession qui avait commencé il y a si longtemps venait de se cristalliser. Il ne parviendrait plus  jamais à s’en défaire.»  
Voilà c’est dit: sa vie sentimentale s’est arrêtée à ce moment-là. Toute sa vie il attendra  le retour de sa sœur partie travailler aux Etats-Unis. Ils n’ont que peu de contacts. Lui  sombre «dans une vie intermédiaire  entre glaciation et dépression».  Elle se rappelle surtout à lui lorsque quelques soucis d’argent la chiffonnent et quand enfin elle revient,  c’est la surprise.

Inutile de le cacher : je me suis ennuyée en lisant ce roman. Il est peut-être léger, drôle et subtil comme l’ont écrit les journaux. J’y ai surtout vu une infinie tristesse, de celle qui ne crie pas mais qui vous suit partout ensuite, la tristesse insidieuse d'un être qui se détruit à petit feu pour l'émotion d'un instant qu'il transforme en éternité. 
J' ai choisi ce roman en vue de la lecture commune  du dernier livre de l'auteur: La vie est brève et le désir sans fin, qui me plaira davantage, j'espère. 
L'homme-sœur de Patrick Lapeyre (P.O.L. 2004, 279 p.)

dimanche 28 août 2011

Le melon de Saint-Amant, Dimanche poétique


Quelle odeur sens-je en cette chambre ?
Quel doux parfum de musc et d'ambre
Me vient le cerveau réjouir
Et tout le coeur épanouir ?
Ha ! bon Dieu ! j'en tombe en extase :
Ces belles fleurs qui, dans ce vase,
Parent le haut de ce buffet,
Feraient-elles bien cet effet ?
A-t-on brûlé de la pastille ?
N'est-ce point ce vin qui pétille
Dans le cristal, que l'art humain
A fait pour couronner la main
Et d'où sort, quand on en veut boire,
Un air de framboise à la gloire
Du bon terroir qui l'a porté
Pour notre éternelle santé ?

Non, ce n'est rien d'entre ces choses,
Mon penser, que tu me proposes.
Qu'est-ce donc ? je l'ai découvert
Dans ce panier rempli de vert :
C'est un MELON, où la nature,
Par une admirable structure,
A voulu graver à l'entour
Mille plaisants chiffres d'amour,
Pour claire marque à tout le monde
Que, d'une amitié sans seconde,
Elle chérit ce doux manger
Et que, d'un souci ménager,
Travaillant aux biens de la terre,
Dans ce beau fruit seul elle enserre
Toutes les aimables vertus
Dont les autres sont revêtus.

... Ha ! Soutenez-moi, je me pâme,
Ce morceau me chatouille l'âme ;
Il rend une douce liqueur
Qui me va confire le coeur ;
Mon appétit se rassasie
De pure et nouvelle ambroisie,
Et mes sens, par le goût séduits,
Au nombre d'un sont tous réduits.

Ni le cher abricot, que j’aime,
Ni la fraise avecque la crème,
Ni la manne qui vient du ciel,
Ni le pur aliment du miel,
Ni la poire de Tours sacrée,
Ni la verte figue sucrée,
Ni la prune au jus délicat,
Ni même le raisin muscat
(Parole pour moi bien étrange),
Ne sont qu’amertume et que fange
Au prix de ce Melon divin,
Honneur du climat angevin.

Ô manger précieux ! délices de la bouche !
Ô doux reptile herbu, rampant sur une couche !
Ô beaucoup mieux que l’or, chef d’œuvre d’Apollon !
Ô fleur de tous les fruits ! Ô ravissant Melon !
Les hommes de la cour seront gens de parole,
Les bordels de Rouen seront francs de vérole,
Sans vermine et sans gale on verra les pédants,
Les preneurs de pétun auront de belles dents,
Les femmes des badauds ne seront plus coquettes,
Les corps pleins de santé se plairont aux cliquettes,
Les amoureux transis ne seront plus jaloux,
Les paisibles bourgeois hanteront les filous,
Les meilleurs cabarets deviendront solitaires,
Les chantres du Pont-Neuf diront de hauts mystères,
Les pauvres Quinze-Vingts vaudront trois cents argus,
Les esprits doux du temps paraîtront fort aigus,
Maillet fera des vers aussi bien que Malherbe,
Je haïrai Faret, qui se rendra superbe,
Pour amasser des biens avare je serai,
Pour devenir plus grand mon cœur j’abaisserai,
Bref, Ô Melon sucrin, pour t’accabler de gloire,
Des faveurs de Margot je perdrai la mémoire
Avant que je t’oublie et que ton goût charmant
Soit biffé des cahiers du bon gros Saint-Amant.

Le melon (extrait) de Marc-Antoine Girard, sieur de Saint-Amant (1594-1661),  poète baroque et libertin du 17e siècle,  militaire et diplomate français,  écrivain original, fantasque et capricieux, fils d’un officier de marine, issu d’une famille de marchands protestants rouennais, il commanda pendant vingt-deux ans une escadre anglaise, n’apprit pas les langues anciennes mais, par une curiosité naturelle,  forma son intelligence dans la société de quelques hommes instruits et apprit l’espagnol, l’italien et l’anglais, ainsi que le langage fleuri dès son enfance avec les galopins de Rouen.(Wikipedia)

Claude Monet,1872, Nature morte avec melon.

samedi 27 août 2011

Un lézard dans le jardin, André Agard, Rentrée littéraire 2011

Rien ne me semble plus délicat à présenter qu’un premier roman : j’ai toujours l’impression dans ce cas de marcher sur des œufs. C’est si fragile un premier roman et l’auteur a dû y mettre tellement d’espoir après y avoir consacré tant de temps!
C’est pourquoi je me suis promis de n’en parler que  si je les aimais. C’est une facilité que je m’accorde et c’est le cas pour ce récit qui s’ouvre  et se déroule essentiellement dans une salle de théâtre où se prépare une pièce très réussie malgré les difficultés rencontrées  mais qui devra s’arrêter après deux représentations. 

Ce théâtre est très particulier puisqu’il se trouve au sein même d’un hôpital psychiatrique et que les acteurs sont autant des malades que des infirmiers ou des docteurs.
Le héros du roman  est aussi le metteur en scène de la pièce,  ce Walter le Valseur si attachant, un schizophrène qui aime les grandes et longues promenades solitaires en compagnie de la petite voix féminine qu’il ne cesse d’entendre. Il semble lointain et silencieux mais il voit et comprend tout et sa présence est apaisante et stimulante à la fois.
L’héroïne est Clara, la narratrice, jeune couturière fétichiste de la soie, ce qui la rend dangereuse et exaltée dans ses moments d’érotomanie en dehors desquels, c’est une personne sensible, posée, amicale et même sage. Elle ressent de l’affection pour Walter malgré la grande différence d’âge mais tout vrai contact et rapprochement entre eux est rendu impossible par leur maladie qui les isole. 
Autour d’eux gravitent  tous les autres  personnages dont le moins atteint n’est certainement pas le docteur en chef  Schwartz, d’autant plus fasciné par le cas de Clara qu’il est lui-même obsédé par le drapé des étoffes dont il fait l’étude. 

La tension monte avec l’approche de la date de la représentation. Les esprits et les penchants s’excitent. Tout devient dangereux. La mort rôde et je ne pouvais plus lâcher le livre une minute: il fallait que je sache ce qui allait arriver. La fin ne m’a pas déçue!
C’est  une histoire très  intéressante que je pensais totalement imaginaire mais l’auteur lui-même renvoie aux cas de deux personnes célèbres dont il s’est inspiré : celui du  psychiatre Gaëtan Gatian de Clérambaultet celui  de l’écrivain Robert Walzer, dont les morts à tous deux sont étranges et  mystérieuses . 
Le premier était un psychiatre dont Lacan disait qu'il avait été son seul maître dans l'observation des malades. Il a écrit: "Passion érotique des étoffes chez la femme" et a mis en scène sa propre mort de façon dramatique.  "Atteint de cataracte, il s'est  suicidé par arme à feu, assis dans un fauteuil face à un grand miroir et entouré de mannequins de cire qui lui servaient pour ses études de drapé".
Sa vie d'ailleurs  inspira le film de Yvon Marciano: "Le cri de la soie" 1996, avec Sergio Castellitto, Marie Trintignant et Anémone.
Quant à Robert Walser, un écrivain et poète suisse de langue allemande, il séjournera jusqu'au jour de Noël 1956 dans une  clinique psychiatrique qu'il quittera pour une promenade dans la neige,  marchant  jusqu'à l'épuisement et à la mort.

Le mot de l'éditeur:
«Enlevez-lui les menottes, murmura-t-il au policier qui m’avait amenée, ici c’est inutile. Il congédia mon cerbère de la même voix trop douce, puis il me tourna le dos pour aller s’asseoir derrière son vaste bureau. Je faillis éclater de rire en voyant qu’il portait des bottines aux talons très hauts, mais je me retins, ce n’était pas le moment. Ce médecin avait le pouvoir, là et maintenant, de me renvoyer en prison ou de me garder dans sa clinique. Et  j’hésitais, je ne savais pas ce que je voulais : être reconnue délinquante ou bien internée comme malade mentale.»

L’auteur: André Agard né le 21 juin 1946 est psychanalyste et psychothérapeute. Il a écrit sur l’échec scolaire et la relation mère-enfant: Il aurait pu être bon élève, Albin-Michel, Paris, 2005; Dans les silences des mères, Albin-Michel Paris, 2007. Il est aussi l’auteur d’un essai biographicolittéraire sur Alain-Fournier, La nécessité du chagrin d’amour, Epel, Paris, 2009. Comédien et metteur en scène, il a dirigé deux troupes de théâtre de 1977 à 1982. 
André Agard - Un lézard dans le jardin, (Éditions Thierry Marchaisse, août 2011, 136 pages, Premier roman,   ISBN : 9782362800047)
Troisième participation à la rentrée littéraire 2011 pour le challenge de Hérisson 08 
Participation aussi au Défi de Anne: Premier roman

vendredi 26 août 2011

Delphine de Vigan - Rien ne s’oppose à la nuit

Voici un livre que j’ai aimé  et qui m’a profondément touchée. Dire qu'il m’a plu ne serait pas juste: ce n’est pas un livre plaisant car trop douloureux mais c’est un livre bien fait, bien écrit et très émouvant sur les rapports dangereux mère/ fille quand surgit une maladie mentale mais aussi sur les difficultés d’en parler et d’évoquer les problèmes relationnels d'une grande famille. .
 Il s’agit en effet d’un roman témoignage où une fille, romancière à succès, ressent le besoin d’enquêter auprès de ses proches sur  la vie de sa mère longtemps atteinte de violentes crises délirantes qui vient de se suicider à soixante et un ans.
Ce n’est pas une entreprise facile et se replonger dans les souvenirs des uns et des autres, remuer un lourd passé partagé par tant de  proches issus d'une famille nombreuse, tout cela est très douloureux et demande à l’auteur beaucoup de courage, de persévérance et de volonté.
Delphine de Vigan ne nous cache rien de ses difficultés à écrire sur un sujet aussi perturbant  que les secrets d’une grande famille bourgeoise et catholique  d’après guerre qui «incarne ce que la joie a de plus bruyant, de plus spectaculaire» mais qui tait jalousement tant de secrets que tous voudraient oublier, voire nier mais  surtout pas publier: suicides de jeunes  fils, inceste, trahisons, maladies , alcoolisme, rien ne nous est épargné.
«Écrire sur sa famille est sans aucun doute le moyen le plus sûr de se fâcher avec elle. …Je tire à bout portant et je le sais. ». Et d’évoquer «la terreur dans laquelle m’a plongée la lecture du très beau livre de Lionel Duroy, Le chagrin,  qui revient sur son enfance et raconte la manière radicale et sans appel dont ses frères et sœurs se sont éloignés de lui…il est le traître, le paria.
La peur suffit-elle à se taire ?»

J’ai aimé que ce drame  avant tout  personnel et familial soit aussi étroitement  relié à la vie sociale, politique et culturelle de son époque.  Y sont évoqués  mai 68 et la libération des mœurs, la victoire de Mitterrand et les grands espoirs qu’elle a suscités, les émissions célèbres comme ce passage  chez Pivot d’un couple de leur famille qui racontait déjà la vie vécue auprès d’une malade qu’on disait encore maniaco-dépressive.
«J’espérais que l’écriture me donnerait à entendre ce qui m’avait échappé, ces ultrasons indéchiffrables pour des oreilles normales, comme si les heures passées à fouiller dans des caisses ou assise devant un ordinateur pouvaient me doter enfin d’une ouïe particulière,plus sensible,  telle qu’en possède certains animaux et, je crois, les chiens.  Je ne suis pas sûre que l’écriture me permette d’aller au-delà de ce constat d’échec » « Non, personne ne peut empêcher un suicide ». 

La photo de la couverture est celle de Lucile, sa mère «à la table familiale de Versailles ou de Pierremont» «Le noir de Lucile est comme celui du peintre Pierre soulages. Le noir de Lucile est un Outrenoir, dont la réverbération, les reflets intenses, la lumière mystérieuse, désignent un ailleurs.»
Un autre peintre  souvent évoqué aussi  est Gérard Garouste et son livre «L’intranquille» où il est question de la même maladie

C’est mon deuxième livre de la rentrée 2011 et j’en recommande vivement la lecture comme le font Clara, Canel, mais  pas Émeraude qui  ne l'a pas apprécié.
Une interview de Delphine de Vigan ICI
Participation n° 2 au challenge de Hérisson 08

 Edit du 1er septembre: Le Prix FNAC vient de lui être attribué de préférence à:
Les souvenirs, David Foenkinos,  Désolations, David Vann , Le Héron de Guernica, Antoine Choplin , Retour à Killybegs, Sorj Chalandon , Eux sur la photo, Hélène Gestern, Tout, tout de suite, Morgan Sportes 
Rien ne s’oppose à la nuitDelphine de Vigan (JCLattès, 437 pages,  août 2011)

jeudi 25 août 2011

Wilhelm Albert Włodzimierz Apolinary de Wąż-Kostrowicki a dit


Quand on a le temps on a la liberté

Du rouge au vert tout le jaune se meurt

La fenêtre s'ouvre comme une orange

Le beau fruit de la lumière.



Apollinaire: Les fenêtres.

mercredi 24 août 2011

Nouveau Doodle littéraire pour le 112e anniversaire de Borges

J'aime bien quand je découvre au hasard d'un simple clic un nouveau Doodle consacré à un écrivain.
Cette fois il s'agit du poète argentin Jorge Luis Borges né à Buenos Aires le 24 août 1899 et mort en 1986 à Genève.(En cliquant sur son nom: Wikipedia dira l'essentiel sur cet auteur.) 
 Pour en savoir plus sur sa poésie : Danger Poésie

Blacksad, Quelque part entre les ombres, T1, Diaz Canales et Guarnido. Ma BD du mercredi

Je me suis finalement décidée à lire cette série  fortement recommandée et primée, le titre le plus lu et commenté dans le top BD de Yaneck. Je serai la vingt deuxième.
Je commence doucement par le tome 1. Je n’aime en principe ni les BD policières ni les personnages animaux mais je reconnais que cette BD a d’autres qualités pour me  séduire.
L’intrigue elle-même est des plus banales mais me fait penser aux histoires de Ellroy et Chandler dans une Amérique des années cinquante, ma période préférée. 
Blacksad, le beau chat noir au museau blanc, toujours élégant dans ses costumes bien coupés et son imperméable de rigueur décide d’enquêter sur le meurtre de son ex compagne, Natalia Wilford, une actrice célèbre.
«Une étoile s’était éclipsée abandonnant mon passé dans le noir,égaré quelque part entre les ombres et personne ne peut vivre sans son passé.» 

Le récit ensuite, très mouvementé, est une histoire de haine, de vengeance et de corruption  où avec le commissaire-chien SmirnovBlacksad combattra l’organisation du crime.
«Désormais, j’étais condamné à ce monde-là : une jungle où le gros dévore le petit, où les hommes se comportent comme des animaux.»
Cependant comme tout le monde, ce que j’ai préféré et admiré ici, ce sont les dessins, les couleurs l’organisation des pages. L’ambiance de la ville, les grandes vues panoramiques, les rues, l'intérieur des appartements vue de haut m’ont particulièrement charmée. J’ai adoré la dernière page et cette plongée sur  une  rue de New york pleine de voitures  illuminées la nuit, vue du haut d’un gratte-ciel. J’ai senti le besoin de revoir toutes les pages indépendamment de l’histoire. C’était encore plus magnifique. 


Blacksad, T1, Quelque part entre les ombres, Juan Díaz Canales,  Juanjo Guarnido, (Dargaud,2000, 48 p)



Participent aux BD du mercredi: 
Arsenul Benjamin, Choco, Chrys,DelphineDidi, Dolly, Emmyne, Estellecalim, HildeHérisson08, IrrégulièreJérôme,     Kikine, Lire pour le plaisir, Lou,  Lounima, Lystig,  Mango,  Maël Lasardine Lastennet  Manu, Margotte, Marguerite,  Mathilde,Moka,  Mo', Noukette, Pascale,   Sandrounette, Sara, Soukee, Theoma, Valérie,  Vero,Wens, Yaneck, Yoshi73  Yvan, Mr Zombi


Je participe aussi au challenge BD Pal sèches  de Mo', au Top BD de Yaneck. (Note: 16,5 /20)

mardi 23 août 2011

Défis de lectures de fin d’été 2011: échec ou réussite?

Pas sûr du tout de réussir! Loin de là! Qui a cru que sa vie de lectrice cet été serait un long, long fleuve tranquille? Je me faisais des illusions! C’était sans compter sur les engagements  pris trop vite. Maintenant je patauge et voici le désolant constat de cette fin de mois d'août si maussade question climat en région parisienne.

Me reste à lire:
Deux lectures communes tout d’abord et pas n’importe lesquelles mais de la grosse artillerie.
Autant en emporte le vent de Mitchell pour le 2 septembre
Le Maître et Marguerite  de Boulgakovpour le 1 septembre et le Blogoclub

D’ici là j’ai  quelques livres à rendre dès maintenant à la bibliothèque mais les billets restent à faire :
La mort à Venise de Thomas Mann
La vie est brève et le désir sans fin  de Patrick Lapeyre (pour la LC du 29/9) Bon je vais devoir le faire prolonger
Et surtout, celui que je ne voudrais pas rendre sans l’avoir lu : City Boy de Edmund White avec préface de John Irving

Sans oublier les deux de la rentrée :
La question Finkler de Howard Jacobson
Rien ne s’oppose à la nuit  de Delphine de Vigan (en cours : je ne le lâche plus !)

Et puis les partenariats qui devraient se glisser quelque part mais où et quand?
Les derniers arrivés:
Rouge majeur de Denis Labaye
Un lézard dans le jardin de André Agard (en cours de lecture)

Sans parler des quatre autres qui sont mes remords de l'année puisque je ne les ai pas terminés encore, bien que commencés et aimés mais si gros que je dois régulièrement les interrompre.
Hush de Kate White
Le pays des Grottes sacrées de Jean M Auel
Le Passage de Justin Cronin
Fièvre mutante de Preston & Child

Heureusement, je ne crois plus avoir de livre voyageur chez moi (me le signaler surtout si je me trompe!)

lundi 22 août 2011

Les instantanés

Parce que je n'ai pas fini mon livre à temps  comme prévu pour écrire un billet, je me suis amusée au jeu des instantanés.
En moins de dix minutes, il faut essayer de trouver le plus possible de  noms propres de femmes ou d'hommes  composant uniquement le titre d'un roman, d'une pièce de théâtre ou d'un livret d'opéra. S'arrêter à vingt.

  1. Nana
  2. Eugénie grandet
  3. Esther
  4. Hamlet
  5. Cinna
  6. Lucia de lammermoor
  7. Mme Butterfly
  8. Anna Karénine
  9. Serena
  10. Pinocchio
  11. Femina Marquez
  12. Madame Bovary
  13. Jane Eyre
  14. Oliver Twist
  15. David Copperfield
  16. Horace
  17. Paul et Virginie
  18. Manon lescaut
  19. La Princesse de Clèves
  20. Le Cid 
A quoi ça sert? A rien! Ce n'est qu'un passe-temps mais j'aime faire ce genre de listes de temps en temps!

dimanche 21 août 2011

Les Anciens ont dit ces paroles, Poésie chinoise

La terre pour lit, le ciel pour couverture
Que les êtres sont petits! Que les êtres sont grands!
Si le cœur est joyeux, la paix se réjouit d’elle-même
Réputation et renommée, qui les refuse tout à fait?

Kuan Hsiu
Calligraphie de
Long Gue 
Daniel Giraud

samedi 20 août 2011

John Irving, L’hôtel New Hampshire

L’hôtel New Hampshire, c’est tout un symbole : celui de la vie de la famille Berry racontée par John,  le rejeton n°3.
John Berry comme John Irving. John, le narrateur et John,  l’auteur
Deux John et trois hôtels New Hampshire, selon le  rêve du père qui cherche sans fin  son idéal, du New Hampshire à la Vienne européenne  pour finir par revenir en Amérique dans  un hôtel miteux du Maine toujours nommé «New Hampshire» car le rêve reste intact, «vissé pour la vie».
Trois enfants  coup sur coup, les bien-portants : Franck, l’homosexuel,  Franny,  l’éblouissante, «la plus turbulente» et John, le fils du milieu, la figure centrale puis les deux petits derniers, les  handicapés : Lilly, la naine et  Egg, l’enfant sourd.
Autour d’eux, les animaux, les ours, les chiens, ceux qui vivent au cœur de la famille, ceux qui sont morts et qu’on empaille, ceux qu’on aime et qui vous le rendent au centuple mais à leur manière  et puis  les serviteurs, les amis, les anciens que l’on perd peu à peu, Iowa Bob, l’aïeul, le coach, l’obsédé de culture physique, Ronda Ray, l’employée à la chambre de repos, l’initiatrice, la prostituée, celle dont le souffle séduit par le canal d’un interphone et qui reste avec les nains du cirque Fritz,  et puis les amis, Freud, Urick,  celui-ci noyé dans sa  baignoire, lui, «un vieux marin maintes fois réchappé de l’abîme».
Les hôtels,  ce sont des  cirques à eux tout seuls, des  ménageries, les  lieux de vie d’une troupe familiale élargie, à des époques diverses.
 Le récit englobe l’avant-guerre immédiate, 1939,  juste avant la naissance des enfants, les années cinquante et la reconstruction européenne à Vienne, avec ses références au vrai Freud  ainsi que  la leçon qu’ils en tirent «Attention aux fenêtres ouvertes», puis  le retour à  New York,  Noël 1964 momentanément à l’hôtel Stanhope.
C’est là que se revivent les drames anciens, viol, inceste, humiliations. Là que les plaies s’ouvrent à nouveau  avec la rencontre à Central Park de Chipper Dove, l’ami violeur jamais pardonné sur qui le piège se refermera grâce à Susie, l’amie ourse du moment.
«Et voici l’épilogue ; l’inévitable épilogue.» Le dernier hôtel New Hampshire «Dans un monde où flottent l’amour et le chagrin, il y a une foule d’épilogues. …A l’hôtel New Hampshire,  nous sommes tous rivés pour la vie. Donc nous nous obstinons à rêver. Ainsi inventons-nous nos vies.»

Inutile de dire que je ne suis pas déçue. Après Garp et son petit monde, Twisted River et sa dernière nuit, nouveau coup de cœur pour  cet hôtel New Hampshire en trois versions.
John Irving. L’hôtel New Hampshire.
Traduit de l’américain par Maurice Rambaud
En lecture commune avec Val. Nouvelle participation au challenge John Irving et au challenge de sofynet

vendredi 19 août 2011

Amélie Nothomb, Tuer le père

Ma rentrée littéraire commence une nouvelle fois avec Amélie Nothomb. C’est désormais  un rituel que je ne veux pas manquer:   le signal de la rentrée littéraire. Et puis au moins en le lisant dès sa sortie, je ne suis pas influencée par d’autres jugements ni même par le sujet de l’histoire puisqu’il n’y a pas de résumé en quatrième de couverture. 

Tuer le père  en 151 pages peut se  lire sans précipitation  en moins de deux heures, d’une traite et  avec entrain.  Aucun temps mort. Les pages se tournent toutes seules. Dès les premières lignes j’étais intéressée, prise dans les filets de cette sorcière d’Amélie dont la principale qualité est d’être une excellente conteuse qui ne m’a plus  lâchée  jusqu’à la fin de son histoire où tout s’est gâché, comme d’habitude, avec mon habituelle indignation : 
"Quoi? C’est tout? C’est ainsi que ça finit? Il n’y a pas de suite?  Mais c’est n’importe quoi! Elle nous laisse en plan une fois de plus! C’est pas juste! Elle a pas l’ droit … et ainsi de suite jusqu’à ce qu’enfin mon émotion s’apaise, celle de l’enfant qui réclame toujours plus  à son parent lecteur du soir : et après,  et après? Encore une! N’éteins pas!"

N’éteins pas Amélie! Pourquoi ces fins toujours bâclées ou pour le moins décevantes?  Ici, franchement, l’histoire méritait mieux que cette pirouette finale! Tout ça pour en arriver là?  Bon, peut-être que ce dernier chapitre plaira aux autres lecteurs après tout!  

Je ne veux surtout pas trop dévoiler l’histoire, simplement évoquer les principaux ingrédients de cette année.
Premier et dernier chapitre qui encadrent le récit central : le 6 octobre 2010 à la fête de «L’illégal» à Paris,  des magiciens du monde entier sont venus fêter les dix ans du club. Amélie, la narratrice s’y trouve déguisée en Nothomb avec son grand chapeau. Elle remarque deux hommes, deux grands magiciens américains: le plus jeune, Joe Whip,  qui gagne au poker admiré par  la foule et l’autre, Norman Terence, le seul qui évite de le regarder.
- Il y a un problème entre eux deux ?  demandai-je. 
- C’est une longue histoire, commença quelqu’un. 

C’est cette histoire qui est développée dans le roman et qui commence à Reno, Nevada, en 1994. 
  Abandonné par son père à sa naissance, Joe, à quatorze ans déjà bon magicien,  abandonne à son tour sa mère qu’il méprise. De ses quinze à ses dix-huit ans il sera accueilli comme un fils par un autre magicien plus âgé, Norman qui deviendra son professeur. Christina, sa compagne,  une des meilleures fire dancers qui  jongle avec des torches enflammées l’accueille  aussi avec bienveillance. Ils forment alors une vraie famille.  Les deux adultes veillent au mieux sur son éducation  lui interdisant par exemple de goûter aux drogues qu’eux-mêmes s’autorisent de temps en temps.
Un  moment fort du roman a lieu le 28 août 1998, lors du Burning man,  à Black Rock, dans le désert où se rassemble chaque année une foule énorme façon Woodstock.  Joe a dix-huit ans, tout lui est désormais permis et il va en profiter. En dire plus serait spoiler
L’un est admirable d’honnêteté, genre mormon, l’autre n’est qu’un tricheur. Condamnés à rester ensemble, qui détruira l’autre? 
De quoi s'agit-il au juste? Tuer le père ou tuer le fils? Quel est le plus têtu des deux? Le plus joueur? Le plus fou? 
A l'année prochaine Amélie!

Amélie NothombTuer le père ( Albin Michel, août 2011, 151 pages, 16 €)
Première participation au Challenge de Hérisson08